Les situations extrêmes de la subjectivité nous semblent parfaitement rendre compte du vécu des victimes des actes terroristes. Elles désignent des situations « dans lesquelles la possibilité de continuer de se sentir « sujet », de continuer de maintenir le sentiment de son identité, et d’une identité inscrite au sein de l’humaine condition, est portée à son extrême, voire au-delà du pensable » (R. Roussillon, 2005)
Les situations extrêmes de la subjectivité ne se résument pas à des situations de détresse et d’impuissance, « elles sont cela, mais elles sont plus que cela (…) Les situations extrêmes de la subjectivité confrontent à des affects qui vont au-delà de l’impuissance et de la détresse, qui présentent des formes « dégénérées » de celle-ci voire déshumanisées » (R. Roussillon, 2005)
Il ne s’agit pas non plus de souffrance psychique puisque la souffrance désigne un affect qui possède un sens, elle appartient à l’humaine condition ; Pour rendre compte de cet éprouvé, R. Roussillon préfère parler de « douleur aiguë », « douleur psychique », « douleur sans « sens » acceptable », « douleur déshumanisante »,
À cet affect, s’ajoute celui l’effroi, de la terreur ; W. Bion précise qu’elle est « sans nom » afin de souligner son caractère désorganisateur et durant un temps tel que la notion du temps elle-même se perd. La fuite effective de la situation traumatique dans ces cas s’avère impossible, « la situation est sans recours, la révolte est vaine, il n’y a pas d’objet de recours externe concevable, la situation produit une situation d’impasse subjective » (R. Roussillon, 2005),
Peu à peu le sujet traumatisé se voit envahi d’un désespoir absolu, d’une rupture du « contrat narcissique » (P. Aulagnier) c’est-à-dire du contrat implicite qui le relie au reste de l’humanité, « qui l’inscrit dans l’humaine condition. R. Roussillon évoque le terme de « crime contre l’humanité psychique », qui « tue l’humanité, l’humanité en soi mais aussi le sens de l’humain même »,
Dès lors la déshumanisation entraîne non seulement la perte de dignité humaine mais aussi un sentiment de honte, de déréliction, de solitude absolue face à son éprouvé, vécu comme absurde et insensé,