Traumatismes et travail de deuil :

Un évènement traumatique constitue une rupture de vie dans l’histoire du sujet : il y avait la vie d’avant il y aura la vie d’après. Cette vie d’avant, il s’agit de la mettre au passé pour pouvoir envisager l’avenir et c’est ce que permet le travail de deuil (=processus d’ajustement naturel à la perte) ; c’est à l’issue de ce travail que l’on pourra à nouveau envisager l’avenir, réaliser de nouveaux projets.

Pour cela, certaines étapes sont inévitables, même si elles seront, selon les personnes, d’une durée variable : Une durée excessivement prolongée témoignera d’un deuil pathologique, c’est-à-dire de l’impossibilité d’accepter la perte, tout comme l’absence de ces étapes, avec une attitude aussitôt positive, ne serait pas forcément de bon augure.

Aussi, la complexité de la réalité dépasse souvent les efforts de modélisation et il peut bien souvent y avoir chevauchement de ces différentes étapes du deuil.

La qualité de l’étayage de l’environnement proche sera aussi importante dans ce travail : un entourage capable de déculpabiliser, réconforter, renarcissiser, comme nous nous proposons de le faire, facilitera le travail intrapsychique et  évitera ainsi des désorganisations et des débordements trop importants.

 

Les différentes étapes du travail de deuil :

  1. Le choc et le déni:

La première étape du deuil révèle un sujet d’abord anéanti, abasourdi, suivi d’une phase où la personne pense qu’il doit s’agir d’une erreur ou encore qu’elle peut changer la donne en négociant.

En effet, l’évènement traumatique impose au sujet un état de passivation : alors que la passivité implique un certain investissement (ex : nous écoutons une personne parler, c’est-à-dire que nous en avons fait le choix, nous pouvons à tout moment mettre un terme à la conversation ou encore prendre la parole, bref nous sommes là en tant que sujet), dans la passivation il s’agit d’une passivité forcée, la personne n’a pas choisi, il s’en suit un sentiment de faillite narcissique liée à ce vécu d’anéantissement psychique, la personne n’est plus là et se retrouve réduit à un statut d’objet.

C’est ce vécu d’anéantissement qu’il s’agira alors de dépasser. Reprendre un rôle actif face à l’évènement permettra au sujet de le dépasser.

  1. la colère, le marchandage :

Avec la prise de conscience de la réalité, survient la phase de colère où la personne se révolte, considérant que ce qui vient de lui arriver est  injuste ; phase délicate où s’entremêlent des sentiments contradictoires, de la culpabilité, des accusations, etc.

La personne va donc essayer de négocier, proposer des solutions, s’initier à certains rituels, etc., afin de tenter de conjurer le sort.

  1. la dépression ou le repli

Les tentatives de négociations s’étant révélées vaines, les rituels sans effet et le constat que la perte est inéluctable, la personne traversera une phase de déprime (=état de tristesse passager) voire de dépression (=état de tristesse intense, fatigue intense, changement d’appétit, humeurs changeantes, difficultés à se concentrer de plus de 15 jours), une difficulté à affronter le quotidien.

La personne pourra tout simplement ressentir le besoin de s’isoler : la libido (=quantum d’énergie vitale) se répartit telle une balance énergétique, sur le Moi ou sur l’objet ; l’objet en psychanalyse correspond à tout ce qui constitue le monde extérieur : travail, famille, amis, etc...  Plus la personne investit le monde extérieur, plus le moi s’appauvrit et inversement.

Dans le cadre du repli narcissique, la personne retire ses investissements du monde extérieur pour réinvestir le Moi.

  1. Phase de reconstruction :

Arrive enfin le moment où la personne trouve en ses ressources propres et avec un accompagnement, la force de sortir de sa douleur et de son isolement.

Le travail de deuil n’est pas un travail sur l’oubli, c’est un travail permettant le passage d'un état à un autre, un espace transitionnel, un processus de cicatrisation indispensable au cours duquel, nous apprenons à apprivoiser la perte.