La thérapie analytique :

À l’inverse des approches précédentes, la psychanalyse est une discipline humaine, elle ne considère pas l’homme comme une machine, ni ne le réduit au fonctionnement de son cerveau ou à la somme de ses comportements, mais considère l’homme dans sa globalité somato-psychique, dans sa singularité et aux prises avec son environnement.

En psychanalyse, le symptôme est considéré comme la solution (malheureuse) que le sujet a trouvée pour faire face à une situation et son impossibilité d’agir autrement : le travail thérapeutique aura pour objectif de comprendre tout d’abord cette façon particulière d’être au monde et de lui permettre, grâce à une meilleure connaissance de soi, d’ouvrir un éventail de possibles, afin de rendre le symptôme actuel,  inutile.

À l’heure du scientisme triomphant, la pertinence de la psychanalyse crée des doutes : il n’est plus question d’une très suspecte intériorité ou d’une quelconque subjectivité, encore moins d’essayer de comprendre une façon particulière d’être au monde, mais le temps est  à la normalisation et la médicalisation de la vie.

Il est reproché à la démarche analytique, son manque de rigueur: effectivement, la psychanalyse ne fait pas de statistique, pas de protocole standard d’évaluation, ni de protocole standard de traitement puisque chaque cas est unique, mais son efficacité est pourtant réelle.

La théorie et l’efficacité de la psychanalyse peuvent à présent concrètement être démontrées par les neurosciences : avec  les concepts de plasticité cérébrale, d’épigénétique et de synapto-architectonie, non seulement la trace mnésique du trauma se matérialise, la plasticité peut donc se concevoir comme un mécanisme par lequel chaque sujet est singulier et chaque cerveau est unique, l’environnement a une action modificatrice sur le génome, un changement de cadre a des effets sur les liaisons synaptiques établies, la remémoration d’un souvenir modifie les liaisons synaptiques : dans cet état d’esprit,  la psychanalyse peut donc parfaitement être un opérateur de renouvellement de la synato-architectonie en suscitant de nouvelles associations et constituer un « environnement » apte à replastifier l’architecture synaptique.  (D’après l’article : Plasticité neuronale : les traces et leur destin. L’article de F. Ansermet, M. Arminjon et P. Magistretti)

S’intéresser au sujet dans sa globalité, c’est le considérer dans l’essence même qui le constitue : le temps. Le temps est cette façon dont la vie prend forme. Comme le constate Bergson, la science n’a rien compris au temps, parce qu’elle commence à le mesurer, c’est-à-dire à le transformer en espace : c’est de l’espace que nous lisons sur une horloge, c’est de l’espace lorsque nous lisons les jours, les mois, les années sur un calendrier.

Notre temps ressemble davantage à de la durée solidifiée, « prise en chair » dans une forme,  « notre corps qui avance dans le temps est cette durée prise dans la matière » (Bergson)

C’est la raison pour laquelle, nous nous intéressons au passé du sujet, à son histoire qui a permis de constituer son identité, ses paradoxes, ses fragilités et ses incertitudes pour les utiliser comme tremplin à leur puissance d’agir dans le présent, vers l’ouverture d’un avenir.

La thérapie analytique permet en effet de créer cet espace potentiel, cette aire de créativité qui permet à chacun de trouver sa façon singulière d’être au monde afin qu’il puisse admettre, pour reprendre Winnicott, que la vie vaille la peine d’être vécue.

Nathalie Neyrolles, 02 juin 2020